UNE « MAISON À USAGE DE LABOUREUR »
C’est en ces termes qu’est désignée la ferme sur l’acte de décès du grand-père paternel du peintre. Juliette, la sœur cadette de Gustave, hérita de la ferme à la mort de leur père Régis, et la vendit en 1910 à la famille Bourgon. Métayers* pour le compte du père de Gustave Courbet, ils logeaient dans la demeure jusqu’à ce qu’ils la vendent à la communauté de communes qui la cède pour 1 euro symbolique au Département du Doubs en 2008, pour la réhabiliter et la valoriser au sein du projet « Pays de Courbet, pays d’artiste ».
La ferme familiale Courbet
Implantée dans le village de Flagey, sur le plateau d’Amancey, la ferme familiale des Courbet est un témoignage de l’activité agricole de la famille.
Initialement acquise par le grand-père paternel du peintre, la ferme est reprise par son fils, Régis Courbet qui l’agrandit et la diversifie grâce à un sens aigu et débordant de créativité. A la fin du XVIIIème siècle, le père de Régis Courbet achète une charge d’archer garde à la Connétablie et Maréchaussée de France. Son fils, Régis (1798 -1882) et père de Gustave Courbet reprend l’exploitation.
« Les améliorations agricoles le préoccupaient vivement. Il fit plusieurs tentatives de grande culture, sans succès d’ailleurs ; il essaya du drainage, inventa une herse, perfectionna d’autres outils. Mais il se lassait vite. J’ai vu à Flagey un grenier rempli de ses inventions ; toutes sortes d’engins inutilisés et inutilisables y dormaient dans la poussière, témoignant à la fois des erreurs de l’inventeur et de son inconstance. »
Jules-Antoine Castagnary dans une lettre à son ami Gustave Courbet cité dans le numéro du 1er janvier 1911 de la revue « Gazette des beaux-arts : courrier européen de l’art et de la curiosité » (page 7)
Gustave Courbet (1819-1877), Portrait de Régis Courbet, père de l’artiste, 1874, huile sur toile, Paris, Petit Palais, musée des Beaux-arts de la Ville de Paris
© Paris Musées, Petit Palais, Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris
La Ferme Courbet au XXème siècle
A la suite du décès de Régis Courbet en 1882, Zoé et Juliette (sœurs du peintre) héritent de l’ensemble de ses biens dont de nombreuses possessions sur le territoire du canton d’Amancey ainsi que la ferme. La brouille avec Zoé, devenue Madame Reverdy, force Juliette à acquérir ses parts pour la somme de 40 000 francs. En novembre 1910, Juliette Courbet cède la maison familiale à la famille Bourgon, métayers appréciés et fidèles des Courbet.
« Du 11 novembre 1910. Il a été déposé pour être transcrit l’acte de mutation dont suit la teneur. Par devant Mt Louis Eugène Maillard, notaire à la résidence d’Ornans, soussigné, A comparu : Mademoiselle Bernardine Juliette Courbet, propriétaire demeurant à Paris, rue de Vaugirard n°55, actuellement en villégiature à Ornans. Laquelle a par les présentes déclaré avoir vendu, cédé et abandonné, sous la garantie de tous troubles, privilèges, hypothèques, évictions et empêchements quelconques, à laquelle elle s’oblige avec indivisibilité entre ses héritiers. A Monsieur Felix Bourgon, propriétaire et Madame Constance Detouillon son épouse autorisée, demeurant ensemble à Flagey, présents et acceptant, acquéreurs solidaires. »
Extrait de l’acte de cession
Dès le milieu du XXème siècle, la Ferme familiale faisait déjà parti d’un « Circuit Courbet », circuit passant par Besançon, Ornans, Saules, Maisières et Flagey, avant même le début du projet de Musée, comme en atteste cet extrait du bulletin de l’Association des Amis de Courbet du 23 juillet 1947 :
« A Flagey, sous la conduite de M. Felix Bourgon, son actuel propriétaire, […] les Amis de Courbet visitèrent la maison familiale. »
Le tournant du XXIème siècle : nouvelle ère pour une nouvelle vie
C’est en 2000 que naît l’idée de valorisation de ce lieu, à la suite du déplacement exceptionnel de l’œuvre Les Paysans de Flagey revenant de la foire (Musée des Beaux-arts et d’archéologie, Besançon), le temps d’un après-midi, à Flagey. En juin 2007, le Conseil Général du Doubs (devenu Conseil départemental) acquiert la Maison familiale pour un euro symbolique. Les travaux de réhabilitation engagés seront terminés en juillet 2009, deux ans avant la réouverture du Musée départemental à Ornans.
© Musée départemental Gustave Courbet
Depuis juillet 2009, les équipes du Pôle Courbet y ont réalisé plus de 30 expositions temporaires et près de 300 évènements culturels (concerts, spectacles, conférences, théâtres…).
Un nouvel élan est donné en 2020 avec l’élaboration d’un nouveau projet scientifique et culturel voulant faire du site de la Ferme familiale Courbet un laboratoire de l’art et la poursuite d’une programmation éclectique, tourné vers l’art vivant.
© Musée départemental Gustave Courbet
© Jack Varlet